touche le cœur et pique la conscience

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ELIDA ALMEIDA

Elida Almeida offre une ode vibrante à ses racines

Avec Di Lonji, « De Loin », son cinquième disque,  Elida Almeida offre une ode vibrante à ses racines, à ce petit archipel qui l’a vu naître et l’inspire à chaque instant : le Cap-Vert.

Après s’être dressée en porte parole d’une nouvelle génération dans son précédent disque (Gerasonobu) il y a deux ans, elle se rêve, modestement, en porte-parole de son « petit pays » : le Cap-Vert. À ce chapelet d’îles battues par les vents, flottant dans l’Atlantique, au large du Sénégal, cette Lisboète d’adoption doit tout : la vie, la musique, l’inspiration…

Ainsi, avant de travailler sur un nouvel opus, la jeune femme de 29 ans se nourrit des nouvelles de sa terre, se berce de ses tempos, se drape de sa « morabeza », son état d’esprit langoureux, par de réguliers voyages, au gré de concerts, de festivals…

Toute sa famille réside encore là bas  : sa mère, ses frères, ses oncles et tantes. 

Loin de son pays natal, Elida ne l’oublie pas et le chante. Et son pays le lui rend bien.

 Auteur / compositeur, l’artiste ouvre  la voie et devient un modèle pour de nombreuses jeunes femmes.

Elida Almeida : le résultat d’un long chemin

Elle est découverte en  2014, par le producteur José Da Silva, qui a révélé Cesaria Evora.  Elle réalise avec son 5ème album, Di Lonji, « De loin », le chemin parcouru.

« Je viens de très loin, confirme-t-elle. D’un pays qui, il y a quelques décennies encore, n’était même pas inscrit sur la map monde…

Surtout, je viens de l’intérieur de l’île de Santiago, d’une campagne si profonde, si reculée, que la plupart de ses habitants ne la quittent jamais. Moi j’ai visité 50 pays, gagné de nombreux prix, diffusé mes créations sur les quatre continents… »

Une destinée hors-norme, due à son seul talent et à sa ténacité.

Ces racines solides sont aussi source d’inspiration. Dans Dondona, par exemple, elle rend hommage à sa grand-mère, 93 ans, toujours en bonne santé. C’est un personnage au caractère bien trempé, à l’image des femmes cap-verdiennes, qui l’a élevée jusqu’à ses sept ans. Elle  lui a transmis le respect et la force, la distinction entre le bien et le mal, lui a enseigné comment coudre et cuisiner… 

« Je suis ainsi une fille de ce territoire qui, dès l’enfance, allait chercher l’eau, aidait sa famille dans les tâches ménagères… Ce socle robuste, cette éducation rigoureuse, forgent la femme que je suis devenue, où que je sois dans le monde…  »  Il y a peu, invitée par la municipalité, Elida est venue chanter pour les habitants de son village. Parmi les invités prestigieux, sa grand-mère, qui a dansé sur scène à ses côtés. « Un des plus beaux moments de ma vie! », s’émeut-elle.

Du miel et de la douceur pour Elida Almeida

Dans Bedjera, la chanteuse raconte aussi l’une de ses occupations d’enfance, dans son village sans télévision ni électricité : la récolte du miel. Dans les montagnes, des tribus de gosses partaient en expédition, recouverts de vêtements des pieds à la tête pour éviter les piqûres…

Sur une tabanca revisitée, modernisée, elle chante cette adrénaline toujours vive. Dans Djarmai, elle se rappelle son adolescence sur la paradisiaque île de Maio, aux idylliques plages de sable blanc, où sa mère avait élu résidence. Un premier amour, la conception d’un enfant, un contact quotidien avec la musique à l’église, à la radio, composent ses propres paysages. Une île où la « morabeza », cette douceur de vivre toute cap-verdienne, rend la vie si savoureuse. Et puis, comme dans chaque disque, elle reprend un titre de l’un de ses groupes culte, Bulimundo. Domingo Denxo raconte la perte de la virginité d’une jeune fille lors d’une soirée de fête sur son île de Santiago.

Enfin, la chanteuse se fait plus grave, lorsqu’elle évoque la douleur de l’inceste et les abus sexuels d’un prédateur sur sa belle-fille. Inspirée d’un fait divers, Mexem dénonce une société patriarcale et violente, qui fragilise dramatiquement les femmes.

Elida Almeida – Des traditions revisitées

Si le terreau musical sur lequel Elida fait pousser ses chansons reste fidèle à la bande-son de son territoire – batuque, funana, tabanca –, la jeune femme n’hésite pas à le réinventer, à le moderniser. Ainsi, la gaïta – l’accordéon –, le ferrinho – le triangle –, ou les percussions du batuque, se métissent, se créolisent sous ses doigts avec des sonorités plus électriques, des couleurs voyageuses, forgées en complicité étroite avec son frère d’armes musical depuis ses débuts, le producteur cap-verdien Hernani Almeida, et l’auteur-compositeur-arrangeur-beatmaker ivoirien, Momo Wang. Tous trois ont composé sans relâche lors d’une résidence de trois semaines sur l’île de São Vincente avec, pour seule compagnie, le roulis des vagues.

En résulte ce beau disque, « Di Lonji », De loin, qui murmure, si proche, ses secrets aux oreilles des auditeurs, qui les galvanisent et les enthousiasment. Car, en parlant avec autant de sincérité, depuis son petit bout de terre, en honorant à ce point ses racines, nul doute qu’Elida Almeida ne s’adresse désormais au monde entier.

Anne-Laure Lemancel

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